La généalogie des Gargotta parle de Jeannette Villepreux-Power

 

Texte tiré d'un volume de recherche de A. Contino, "Una famiglia di naturalisti del XIX secolo: i Gargotta di Termini Imerese" In: A. Contino & S. Mantia, Dallo Studium medievale al Liceo Classico “Gregorio Ugdulena” 700 anni di storia della cultura e delle istituzioni scolastiche a Termini Imerese. Celebrazioni del centenario dell’istituzione del Liceo “Gregorio Ugdulena” (1907-2007), Termini Imerese, 18 dicembre 2007. Istituto di Istruzione Superiore di Secondo Grado “G. Ugdulena” Termini Imerese, Accademia Mediterranea Euracea di Scienze, Lettere e Arti, Termini Imerese, Istituto di Istruzione Superiore di Secondo Grado “G. Ugdulena” Termini Imerese, pp. 54-65.

 

Une famille de naturalistes du XIX siècle :

Les GARGOTTA DI TERMINI IMERESE (Antonio Contino)

 

 

Une branche de l’illustre famille Gargotta de Termini Imerese a été célèbre au XIXe siècle pour avoir suivi avec grande passion le culte du collectionnisme, suivant les pratiques très en vogue de l’époque, pour étudier et pouvoir échanger des idées sur les pièces archéologiques des fossiles, peintures, gravures, camées, monnaies, et les découvertes des espèces naturalistes comme les coquillages vivants, terrestres, fluviaux et maritimes de la Sicile et de l’Etranger, coquillages fossilisés, crustacés, plantes marines, coraux, insectes (surtout le lépidoptère diurne, crépusculaire et nocturne ; coléoptère), minéraux et roches de Sicile, etc.

GENEALOGIE DES GARGOTTA DI TERMINI IMERESE 

La présence des Gargotta à Termini est documentée jusqu’à la fin du XVIe siècle avec Antonio de feu (quondam) Francesco qui en 1604 possédait un jardin dans le fief des Brucato, sur les pentes septentrionales du mont S.Calogero et payait 3 onces à la chapelle du Saint-Sacrement de l'Eglise Majeur.

La généalogie de la branche familiale qui a donné naissance à la collection Gargotta a été reconstituée par la suite à l’issue d’une recherche minutieuse dans les archives de l'Eglise Majeur de Termini, à partir du 9 janvier 1633, date à laquelle un certain Domenico Gargotta a épousé en première noce Maria Miroldo. Dominique, veuf de sa première femme Maria, s’est épousé avec une certaine Francesca, veuve de feu Tommaso David le 5 mars 1643. De cette union nait Antonio qui se marie le 18 septembre 1672 avec Mattea Lo Corso, fille de Girolamo et de feue Domenica.

Onofrio et Gerolamo, fils d’Antonio, sont présents parmi les bienfaiteurs, dans une liste des aisés, voulue par les administrateurs (Giurati) de Termini en 1724-25.

Teresa Gargotta (descendante directe de Onofrio),dernière de six enfants, est née le 30 juillet 1798, de Francesco (de Onofrio et Paola Cavara) et de Caterina Cocilovo. Elle fut l'élève de Giuseppe Gioeni d'Angio (1747-1822),érudit en géologie et en particulier en volcanologie de l'Etna, et par sa volonté naquit à Catane une académie scientifique qui lui prit le nom de Gioena.

Le 22 octobre 1834, à Termini Imerese, Teresa épouse Don Emmanuele Salinas-Spatafora, douanier à Palerme, et le couple s'installe dans cette ville. Avec le medecin et naturaliste sicilien Pietro Calcara (1819-1854), professeur d'histoire naturelle et plus tard de géologie et minéralogie à l'Université royale de Palerme, elle a découvert le gisement fossilifère pliocène d'Altavilla (aujourd'hui Altavilla Milicia, dans l'aire métropolitaine de Palerme).

Teresa Gargotta a eu l’occasion de lier amitié avec une autre naturaliste, française de naissance et sicilienne d’adoption, Jeannette Villepreux Power qui a pu voir la collection Gargotta. Elles ont échangé leurs points de vue sur leurs observations scientifiques respectives.

JEANNETTE VILLEPREUX POWER (Juillac département de la Corrèze, au Sud de Limoges, 25 septembre 1794 à 1871), est la première femme naturaliste à faire partie de l’Académie Gioenia de Catania (la seconde est notre Teresa Gargotta).

Jeanne Villepreux se marie en 1818 à Messine au noble et richissime marchand anglais James Power et le couple s’établit dans la ville précitée. On doit à Jeanne Villepreux la création de l’aquarium ; en effet, elle est la première chercheuse à avoir inventé et utilisé, en 1832, ce qu’on a appelé « la cage à la Power », un vrai et réel aquarium qu’elle a créé pour étudier la faune marine. Ces aquariums ont trois versions : un de verre pour préserver et étudier les mollusques vivants dans une pièce ; un autre, de verre aussi, pour les petits mollusques, protégés dans une cage externe avec des barreaux dans laquelle ils pouvaient être immergés dans l’eau ce qui permettait des observations directes ; et un troisième genre de cage, pour les mollusques plus grands, qui a pu être plongée et encrée dans une profondeur déterminée dans la mer, ce qui permettait de la sortir de l’eau pour étudier les mollusques. Son observation lui a permis de démontrer avec certitude la sexualitédu mollusque céphalopode Argonauta argo Linné (alors que jusqu’ici on croyait arbitrairement qu’ils étaient hermaphrodites comme les mollusques terrestres avec des poumons) et irréfutablement, elle a démontré que le mollusque sortait de sa coquille et ne réutilisait pas celle des autres comme il était affirmé dans certaines études. Jeanne Villepreux Power est donc l’initiatrice de l’Aquarophilie et la première femme chercheuse de la biologie marine.

La chercheuse a parcouru la Sicile recueillant chaque espèce marine. Les fruits de ses recherches ont été répertoriés dans un ouvrage de 250 pages, accompagnées d’un tableau, avec un très long titre regardant l'intinéraire de la Sicile regroupant toutes les espèces de l'histoire naturelle et plusieurs autres de l'antiquité (Itinerario della Sicilia rigardante tutti i rami di storia naturale e parecchi di antichità opera di madama Jeannette Power uno dei membri conispondenti della società zoologica di Londra, della società di Scienze mediche e naturali di Bruxelles, dell'Academia Gioenia di Catania, dell'Academia di Scienze, Lettere e Belle Lettere di Palermo, dell'Academia della Civetta di Trapani, dei Trasformati di Noto, degli Zelanti di Aci-Reale ec. ec.) imprimé à Messina en 1839 à l’imprimerie Fiumara.

L’imposante collection naturaliste Villepreux-Power qui comprenait aussi bien des mollusques vivants que des fossiles ainsi que des minéraux d’une très grande valeur scientifique, a disparu (dans le naufrage du bateau) durant son transport à Londres en 1838. Le couple Villepreux-Power retourne en France en 1842 et s’installe à Paris. A noter que Jeanne Villepreux Power avait en commun avec Teresa Gargotta les Beaux-Arts ce qui a permis à Jeannette de dessiner ses travaux scientifiques avec des tableaux illustrés méticuleux.

Aux chercheurs déjà cités, qui ont pu voir la collection Gargotta, on peut ajouter une liste de talentueux scientifiques, parmi les étrangers il faut citer M.Melly de Liverpool, le docteur Frédéric Caillaud (Nantes) le minéralogiste et géologue professeur docteur Bernhard Studer (professeur en Minéralogie à l’université de Berne et collaborateur de Escher Von der Linth). Parmi les chercheurs siciliens il faut rappeler : le professeur docteur Oronzo Gabriele Costa (professeur en zoologie à l’Université de Naples); le docteur Vittore Ghiliani (du musée zoologique de Turin); le docteur Luigi Benoit (Messine) malacologue; le docteur Bonaventura Gravina di Valsavoia (Université de Catania), grand collectionneur de fossiles et stratigraphe; le docteur professeur Carmelo Maravigna, chimiste, vulcanologue, minéralogiste, malacologue et paléontologue; le docteur Andrea Aradas de Catania, paléontologue et malacologiste; Emanuele Pirajno de Mandralisca (Cefalù) naturaliste et archéologue; le docteur Francesco Minà-Palumbo (Castelbuono), naturaliste.

Teresa Gargotta, s’est intéressée aussi à l’étude des mollusques marins du Golfe de Palerme et a été la Première à découvrir le mollusque CYMBULIA Peron et Lesueur, en 1810.

Après avril 1851, la famille Salinas part pour des raisons de travail à Messina où Teresa meurt le 4 avril 1852. Teresa Gargotta, selon sa biographie anonyme aurait été affiliée à de nombreuses académies réputées scientifiques nationales et internationales. Le biographe anonyme se limite à citer seulement les académies siciliennes Gioenia de Catania (fondée par son Maître Giuseppe Gioeni d’Angio) et Zelantea de Acireale. Teresa Gargotta a été une chercheuse appréciée en numismatique et avait une collection de monnaies qui a été agrandie par son fils Antonio.

D’elle, il nous reste un beau portrait peint à l’huile sur une toile (le pendant de celui de son mari, une des œuvres du peintre  Michele Panebianco de Messine qui la représente avec ses livres tant aimés, et qui aujourd’hui est au Musée Archéologique Régionale, donné par le fils Antonino Salinas. Le 6 octobre 2004 la plaque commémorative de Teresa Gargotta Salinas, après bien des vicissitudes, mais grâce à l’administration communale et à la communauté ecclésiastique, a trouvé une place digne dans l’église de S.Croce al Monte (Termini Imerese).

Quatre enfants sont nés par Teresa Gargotta et Emmanuele Salinas : Antonino, Concettina, Paolino et Guiseppe, dont seul le premier a survécu.

Le professeur Antonino Salinas Gargotta était né à Palerme le 19 novembre 1841, et jusqu’à l’adolescence a fait preuve d’un grand génie, en se passionnant pour la science et les lettres. Il s’est orienté progressivement vers ces dernières et s’est consacré avec succès à la numismatique, prédilection héritée de sa famille maternelle, et à l’archéologie. En 1858, il fait publier par l’imprimerie Lo Bianco, L’Appendice alla memoria sulle monete punico sicule Dell’abate Gregorio Ugdulena ed esame della stessa. Il a été nommé Professeur spécialisé en archéologie (1865) et ensuite titularisé (1867). Salinas a été également, directeur du Regio Museo archeologico di Palermo (1873-1914), qui a pris depuis son nom, il a été un des fondateurs de la Società Siciliana di Storia Patria.